Les sneakers, industrie symbole du XXIè siècle ?

Lors de notre dernier voyage d’étude marketing à New-York, nous avions eu l’occasion de nous pencher sur le marché de la sneaker, produit intimement lié à un territoire qui a vu naître le hip-hop et les tagueurs. Croissance, marketing de la rareté, sneakers de luxe ou de chez Lidl, classe d’actifs : zoom sur ces chaussures qui sont devenues à la fois des icônes culturelles et un marché qui accélère sans cesse !

Un marché en grande forme

Industrie née dans les années 80, notamment grâce aux stars du basket et au hip-hop, celle de la sneaker affiche des progressions records d’année en année. Le marché mondial des sneakers était évalué à environ 79 milliards de dollars en 2020 et devrait atteindre 120 milliards de dollars d’ici 2026… Les sneakers sont des pièces incontournables du vestiaire de la vie quotidienne comme de la vie professionnelle, des jeunes comme des moins jeunes (les séniors représentent le deuxième segment après les ados). Elles sont le signe le plus visible de la tendance « athleisure » qui mixe sport et loisirs dans les choix vestimentaires et qui fait les beaux jours d’Adidas, Nike, Puma, New Balance et des plus de 150 marques qui ont débarqué sur ce créneau ces dernières années… Le numéro un mondial du secteur, Nike, a ainsi affiché un chiffre d’affaires historique de 44,5 milliards de dollars en 2020-2021, (+ 19% par rapport à l’année dernière). Et c’est le footwear qui représente la majeure partie de sa rentabilité, loin devant le textile. Adidas, son principal concurrent vise désormais une croissance annuelle de 20 %, tout comme Puma, malgré les impacts de la crise sanitaire sur leur chaîne d’approvisionnement et les problèmes de logistique en Asie.

sneakers- un marché en grande forme

Les éditions limitées et les collaborations marketing

Si les ventes de Sneakers augmentent autant, c’est en grande partie grâce à la communication créée autour des collaborations : avec Kanye West, Raf Simons, ou Rick Owens pour Adidas à laquelle répond son rival historique Nike avec des projets avec Riccardo Tisci et le label japonais Sacai. Les marques se lancent à corps perdu dans ces éditions limitées pour créer le buzz auprès de tous les « sneakers addicts » et associer leur image à des artistes ou des sportifs à la renommée planétaire. Elles jouent à fond la rareté, l’exclusivité, contribuant ainsi à la désirabilité du produit et alimentant la fièvre acheteuse inextinguible des sneakers addicts. Dans un autre genre, Lidl a créé la surprise en 2020 en commercialisant des baskets devenues iconiques, au look affirmé et coloré donc très « instagrammables ».

Le luxe, fan de sneakers

Même les maisons de haute couture ont décidé de suivre la tendance avec des modèles à plusieurs centaines d’euros, la A+P Luna Rossa 21 de Prada avec Adidas, mais qui peuvent allègrement dépasser le millier d’euros, voire plus pour les éditions limitées comme la Chanel X Pharrell Hu Race Trail. La chaussure est désormais la catégorie la plus vendue sur le marché du luxe en ligne et les sneakers ont largement contribué à cette croissance. Dior, Gucci, Fendi, Prada, Balanciaga, Yves Saint-Laurent, et même les grands prêtres des talons hauts comme Jimmy Choo et Christian Louboutin rafraîchissent leur gamme à l’heure où il est de bon goût de marier chaussures de sport et costume sur mesure. Et c’est l’appétence des millennials, âgés de 18 à 35 ans, pour le « luxe expérientiel » qui tire le marché.

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Des sneakers qui valent de l’or

L’achat-revente de baskets a démarré dans les années 90, après le succès des premières Air Jordan fabriquées par Nike pour le basketteur Michael Jordan et devenues rapidement « collector ». Puis il s’est amplifié sur internet dans les années 2000 avec l’avènement du site d’enchères pour particuliers eBay. Aujourd’hui, on achète ces modèles d’exception sous film plastique dans de très chics dépôts-ventes, ou sur StockX, la place de marché valorisée à plus d’1 milliards de dollars consacrée aux sneakers, avec cours quotidiens et cotations. Certains gagnent carrément leur vie en revendant des baskets qui sont devenues une véritable classe d’actif sur laquelle beaucoup investissent. Les Nike Air Yeezy 1 de Kanye West ont été achetées 1,8 millions de dollars lors d’une vente de Sotheby’s, pulvérisant tous les records du genre. Le marché de la revente de sneakers devrait s’accroître à un rythme de 15 à 20 % par an pour atteindre 25 milliards d’euros d’ici à 2030…

La course à l’écoresponsabilité

Face à des jeunes – les premiers acheteurs de sneakers – de plus en plus concernés par les enjeux environnementaux et à la prise de conscience de la pollution causée par l’industrie de la mode, la sneaker écolo commence à se faire une place. Longtemps incarnée par la marque Veja, elle fait aujourd’hui l’objet de fortes innovations avec l’arrivée de nouvelles marques, dont une française que nous connaissons bien et qui s’appelle Ector. Dans ce contexte, les mastodontes du secteur n’ont d’autre choix que de se jeter dans la bataille. Nike et ses Space Hippie en plastique recyclé ou sa ligne Vegan, Adidas et ses Stan Smith Mylo confectionnées dans une matière recyclable à base de mycélium de champignon etc. Reste une question à trancher, celle de la définition d’une sneaker écolo :  conçue à partir de plastique recyclé ? Durable ? Eco conçue ? Vegan ? Produite localement et éthiquement ? Zéro déchet ? A suivre… en courant bien sûr !

 

Cet article a été publié le 13 janvier 2022

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